Picc-Line ou Pique Life ?
En effet, en tant que patient, je me suis posé la question en faisant une analyse SWOT : force, faiblesse, opportunités, menaces.
Parfois entre la santé et le marketing, il n’y a qu’un fil… voire une aiguille !
Pour commencer, je souhaite vous raconter ce qu’est un picc-line et à quoi il sert.
Les médecins n’utilisent pas uniquement cette technique pour les malades du cancer. En effet, le personnel de santé s’en sert également pour des malades qui doivent être reliés simultanément à plusieurs poches différentes qui contiennent toutes sortes de produits.
Je tiens à préciser que je ne suis pas un médecin ni même un aide-soignant !
Je suis malade du cancer depuis 2019 et c’est en étant traité que je me suis intéressé aux techniques existantes et à venir.
J’ai appris la définition du « Picc-Line » pas plus tard qu’il y a un mois, quand j’ai accepté, sur les conseils de mon médecin, que l’on m’en installe un.
Je n’ai pas vraiment eu le choix à vrai dire puisque j’ai été catégorisé « dénutrition sévère ». Personnellement, je ne me rendais pas compte du problème, même si mon entourage me le répétait. Pour vous dire : je trouvais même que j’avais du ventre !!
Lorsque le médecin m’a dit que je devrais en avoir un, j’ai cherché sur Internet en quoi cela consistait et je n’ai rien trouvé de précis sur le sujet.
C’est pourquoi j’ai décidé d’écrire un article sur cette technique maintenant que je l’utilise depuis plus d’un mois. J’espère sincèrement qu’il pourra vous être utile.
Voici quelques schémas explicatifs :
Premièrement, le Picc-Line est un cathéter de 60 cm de long. Il trouve son chemin par une grosse veine profonde (la veine cave supérieure).
Ensuite, il est en général implanté à l’avant-bras ou au-dessus de l’aisselle
Enfin, le point de sortie est en revanche le même pour tout le monde. Il est placé à l’oreillette droite du cœur qui est « une pompe puissante » pour répartir au plus vite et au mieux le produit injecté.
Si bien que, sur les conseils du médecin, je dois marcher quotidiennement pour non seulement ne pas perdre de la masse musculaire mais aussi pour que le produit puisse bien se répartir dans le corps.
Le point d’entrée sera à gauche si vous êtes droitier et vis et versa.
Cette technique est utilisée pour un traitement à long terme allant de 2 mois, à bien plus. Dans ce cas, il est nécessaire de remplacer le Picc-Line qui a une durée de vie limitée à 6 mois.
Le point d’entrée permet d’y insérer une sorte de “multiprise”.
Ainsi, le personnel soignant peut y insérer simultanément des poches différentes. Et aussi faire des prélèvements sanguins.
L’avantage principal du Picc-Line est de limiter les multitudes de points de contacts avec la seringue sur la peau.
Donc cela évite des infections qui peuvent devenir graves comme la septicémie.
De plus, Il existe un « petit » picc-line de 20 cm.
Son point d’entrée est le même mais il ne fonctionne que quelques jours, voire quelques semaines. Il s’appelle le « midline ».
Je vous invite à cliquer sur ce lien qui vous permettra de visualiser les deux formes de cathétérisation.
Dans le cas d’un cancer, pourquoi un Picc-Line ?
Lorsque les médecins ont diagnostiqué par hasard à l’été 2019 ma leucémie (leucémie aigüe lymphoblastique de type T), ils ont été très encourageants en me disant qu’elle se soignait très bien et vite.
Pourtant, les 2/3 mois annoncés sont devenus à ce jour 2 ans… Et je n’ai pas encore de réelle visibilité.
Mon petit corps d’ 1,93m fabrique des métastases très résistantes et qui ont eu la fâcheuse manie de s’étendre à d’autres organes.
Les médecins ont classifié mon cancer comme étant en stade IV, généralisé. Mon pronostic vital est engagé. Mais qui dit engagé ne veut pas dire perdu. Le combat sera juste plus long et difficile.
Mon Picc-Line porte deux poches.
L’une est nutritive. Il y a tous les éléments dont nous avons besoin, vitamines, calories en fonction de la corpulence.
C’est ce que l’on appelle la nourriture parentérale.
L’autre est hydratante.
Ce système me permet de ne pas perdre de poids quand les nausées dues aux traitements sont trop fortes.
Il a aussi un rôle consistant à assurer une rééductation nutritive pour les malades qui sont en situation de dénutrition sévère.
Ainsi, je m’oblige à manger tous les jours pour continuer à faire fonctionner mon système gastrique et reprendre du poids.
PICC-LINE, LES POINTS POSITIFS :
Dans mon cas, je considère que ce dispositif est positif bien que contraignant ; je m’explique.
- Primo, la chimiothérapie détruit les cellules, mais ne fait pas de quartier entre les bonnes et les mauvaises cellules. Elle réduit considérablement nos défenses immunitaires et épuise les patients. C’est pour cela que beaucoup décèdent car ils deviennent trop fragiles et attrapent la première infection à laquelle ils sont exposés.
Des patients décèdent également d’infections dues aux multiples actes de soins. Car en effet la moindre piqure, petite blessure, est une « porte d’entrée » aux germes qui pénètrent dans un corps très affaibli.
- Secundo, comme vous le voyez souvent, les malades du cancer (mais pas que malheureusement) deviennent très maigres. Pour ma part, j’ai perdu 25 kilos (je n’étais pas en surpoids) entre le moment où la maladie s’est déclarée et celui où elle a été diagnostiquée.
Avant de commencer ma chimio, j’étais donc déjà dans une situation de faiblesse. Les traitements m’ont fait perdre encore un peu plus l’appétit, l’envie de boire…
La chimio a pour conséquence de créer beaucoup d’effets secondaires. En ce qui me concerne, j’ai été très fatigué, j’ai perdu mes cheveux et mes sourcils. Je saigne régulièrement du nez. Comme la plupart des malades traités par chimiothérapie, j’ai des nausées. Ce qui induit que j’ai perdu beaucoup de poids et l’habitude de me nourrir convenablement.
En cela, le Picc-Line apporte une aide vitale.
En fonction du nombre de calories qui sont prescrits par le médecin, il me permet d’assurer le maintien de mon poids à un niveau où il n’y a plus de dénutrition.
Surtout, il m’aide à reprendre, petit à petit, sans angoisse, l’habitude de me nourrir normalement.
LE PICC-LINE : AVANTAGES MAIS AUSSI DES CONTRAINTES NON NEGLIGEABLES :
Ce procédé est assez récent dans la mesure où il n’existe que depuis quelques années.
L’insertion de la « bête » se fait par anesthésie locale.
C’est un anesthésiste, échographe ou radiologue, qui insère la canule sous échographie.
Il doit être très précis.
Il arrive souvent qu’il soit obligé de recommencer l’insertion, si la veine qu’il doit piquer glisse.
Ce fut d’ailleurs mon cas.
Après 1 mois d’utilisation, j’ai pu mesurer les avantages et les inconvénients du Picc-Line.
Je suis branché à la machine, pendant 12 heures en tenant compte du fait que je dormirai pendant ce créneau (20H00 à 8H00). J’ai toutefois du mal à me déplacer, même si le porte sérum a des roulettes car les fils qui relient les poches à mon corps sont très courts.
Lorsque je suis débranché, seul mon cathéter reste accroché à mon bras. Je suis totalement libre de mes mouvements.
Toutefois, cette liberté présente ses limites.
En effet, comme l’incision est faite sur la surface de ma peau, toute immersion au niveau de l’incision est formellement interdite.
Dès lors, lorsque je me lave, je dois faire ma toilette en deux étapes. Je nettoie tout le haut de mon corps au gant de toilette (en face d’un miroir bien éclairé afin qu’aucune goutte ne touche le pansement qui est perméable). Ensuite, je me lave du torse aux pieds sous la douche. Je peux donc oublier cet été de me baigner à la piscine ou à la mer.
Une fois le traitement terminé, je ne serai pas libéré immédiatement car les risques de rechute ne sont pas improbables. Ce serait dommage de me retirer le Picc-Line pour m’en remettre un autre un mois plus tard.
Je vais devoir le garder encore 2 mois après la fin de mon traitement.
Mon cardiologue a rédigé une ordonnance spécialement prévue à cet effet. Je suis sous traitement jusqu’au 15 août environ si tout se passe bien.
Je serai totalement libéré de mon cathéter aux alentours du 15 octobre.
L’inconvénient principal du Picc-Line est d’ordre pratique.
Il a une répercussion sur ma vie quotidienne limitant considérablement ma liberté de mouvement.
Je le surnomme avec ce jeu de mots vaseux : le « Pique Life ».
Mais j’ai toutefois voulu lui donner un sens : je gagne en liberté car je ne suis pas obligé de rester à l’hôpital.
Plusieurs infirmiers se relaient tous les jours pour me poser chaque soir le matériel. Chaque matin le retirer. Et refaire une fois par semaine l’intégralité du pansement qui est un geste délicat.
Quelque soit l’endroit où je me trouve, je dois en amont m’assurer qu’un ou une infirmière agréée puisse être présente dans cet endroit.
Ce n’est pas tout. Il me faut trouver du personnel de santé à l’aise avec le Picc-Line et c’est difficile, je peux vous l’assurer ! J’en ai fait l’expérience qui m’a valu plusieurs nuits blanches !
Concrètement :
Pour partir en week-end pendant 2 jours, je dois donc m’assurer au préalable qu’il y ait des infirmiers sachant s’occuper d’un cas comme le mien.
Par ailleurs, je dois m’assurer de ne pas être trop loin d’un hôpital en cas d’infection brutale.
Si j’ai pu « cocher » toutes les cases, je dois ensuite préparer le matériel, le bon nombre de poches etc et cela prend de la place dans le coffre !
Si je pars en vacances ou en déplacement professionnel pendant une semaine ou plus, je dois :
- Trouver un professionnel de santé compétent, qui soit disponible pendant la période et qui accepte de se déplacer.
- Pouvoir me faire livrer tous les produits nécessaires (poches, matériel stérile, tubulures) par une pharmacie à proximité. Une poche de nutrition est très lourde et pèse plus de 2 kg. Ainsi, si je pars 2 semaines, j’aurai besoin de 30 kilos de poches de nutrition et 7 kg de poches d’hydratation.
- Prendre mon support de perfusion à roulettes.
- Trouver un endroit qui soit équipé d’électricité (très proche du lit) pour brancher l’ordinateur qui calcule le débit des poches ainsi que la durée de celui-ci.
- Choisir en amont le vêtement du haut que je veux porter ou pas car une fois le picc-line branché sous l’aisselle, il m’est impossible de mettre ou retirer un T‑shirt dans la nuit.
- Même s’il est possible de pouvoir gérer une sortie au restaurant, en mettant les poches dans un sac à dos prévu à cet effet, la question de l’habillement reste le même.
Je me suis engagé à vous parler à la fois des avantages et des inconvénients car il est nécessaire dans le cas d’une telle technique d’être juste et objectif.
Son avantage premier est de pouvoir être soigné chez soi et non à l’hôpital.
Et ce n’est pas rien d’éviter d’être trop à l’hôpital en cette période de pandémie. Et au-delà de cela, de maladies nosocomiales que je suis plus susceptible d’attraper. Il y a encore 10 ans, avant l’invention du Picc-Line, cela ne pouvait se faire qu’à l’hôpital.
J’ai la chance de bénéficier d’un cathéter « nouvelle génération » qui me permet d’éviter au maximum les nombreuses piqures que les soignants seraient amenés à me faire et l’apparition de germes.
Tous les actes médicaux que je reçois sont sans douleur.
Comme vous pouvez le voir sur le documentaire produit et posté par LEVA LABORATOIRES, le cathéter aussi encombrant soit-il est invisible lorsque je suis habillé.
Aussi, j’ai essayé d’être le plus clair possible concernant une technique que l’on peut définir comme révolutionnaire avec ces inconvénients mais aussi avec ses avantages.
D’ailleurs, je vous invite à regarder le documentaire « PICC-LINE & NUTRITION PARENTERALE » produit et diffusé sur le site de LEVA LABORATOIRES.
Documentaire à visionner en fin de cet article.
Ici, accedez directement à l’onglet vidéo du site LEVA.
Et sur la chaine youtube de LEVA ici.
Je ne fais aucun compromis sur la rigueur hygiénique et l’absence constante de douleur car le cancer en donne déjà suffisamment.
En ce sens, le Picc-Line remplit les qualités principales que je recherche même si je ne reste pas pantois devant, les inconvénients n’étant pas négligeables.
En fait, je dirais que c’est en fonction de ce que chacun recherche qu’il faudra faire un choix. De préférence en parler à votre chirurgien. Mais c’est au final lui seul qui prendra la décision de choisir la meilleure solution en fonction de votre état de santé et de ce que vous pouvez supporter.
Ces inconvénients notables changent ma vie mais surtout celle de mes proches.
Evidemment la spontanéité est beaucoup plus difficile à mettre en œuvre vous l’aurez compris. Vous ne pouvez plus décider de flâner en soirée car le professionnel de santé doit passer dans un créneau horaire pour vous brancher. Impossible sur un coup de tête de partir en fin de journée pour vous faire une sorie ou un week-end improvisé.
Les personnes qui m’aiment et avec qui je vis, voient leur quotidien bouleversé. Mais de plus ils acceptent eux aussi de voir leur zone de confort restreinte. Effectivment, moins de sorties, fini les grasses matinées, la place que prennent les cartons chez soi, la logistique a assurer pour les livraisons médicales. Tout ça se rajoute aux multiples tâches déjà effectuées par l’accompagnant. Ainsi qu’aux multiples rendez-vous chez les médecins, et les examens à faire…
Je n’oublie pas que je suis très privilégié en comparaison aux autres millions de malades de cancers dans le monde.
J’habite un pays où le système de santé est l’un des meilleurs du monde et je ne manque pas de professionnels autour de moi pour m’aider à guérir.
Il n’est pas prévu dans mon cas que je le garde toute ma vie mais seulement quelques mois.
Cela fait partie de l’expérience fondatrice que je vis depuis 2 ans car je ne serai plus le même homme que je ne l’étais avant de tomber malade.
Je suis certain d’une chose : je me battrai jusqu’à mon dernier souffle pour aimer, pour vivre et profiter de la vie.
Le Picc-Line étant un allié supplémentaire dans cette bataille à mort avec la maladie.
William Shakespeare a écrit : « Mon corps est un jardin, ma volonté est son jardinier ».
Cela n’a jamais été aussi vrai.
Texte de Yaakov-Lev Schneersohn-Salzman.
Photos de Sarah-Lev Schneersohn-Salzman
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